Côte atlantique sud, Agadir - Safi
Second matin à Agadir, pendant que les participants au triathlon se jettent à l’eau, je descends acheter de quoi petit-déjeuner, puis m'attelle à mon vélo. Un point dur bien centré dans la direction m’enquiquine depuis quelques jours et il faut que je regarde mes freins avant. Démontage des bagues, du cintre, bref tout, nettoyage, remontage. Soit le point dur est ailleurs sur une position où je ne vais jamais, soit c’est solutionné. Nathalie contente. Les freins, 5 minutes, Nathalie contente encore. À 11 heures, je descends avec Jipe manger une bonne grosse omelette et à midi (heure prévue entre nous), nous enfourchons les bicycles à pédales sous un soleil radieux. Marie fait scission. Sortie d'Agadir congestionnée à cause
de la partie cyclisme du triathlon qui se déroule sur la 2 x 2 voies et détourne tout le trafic sur la route côtière. Cependant, très belle petite étape de 61 km avec l’océan et les kilomètres de plage de sable blond ou de rochers où s’écrase la flotte, juste à côté. Nous nous sommes régalés, même quand le vent nous a fait face. À Tamri, pas d’hébergement malgré une recherche longue et assidue, alors nous tentons notre chance dans le gros hôtel cossu du patelin suivant et le gérant nous ouvre un appartement pour moins de 10 euros par personne. Marie débarque plus tard et après petite discussion dans le calme, Jipe changera de “partenaire” pour terminer son voyage avec moi jusqu’à Casablanca, c’est la fin de ce que l’on avait nommé “Trio Morocco”.
De Tamri à Tafedna, l'étape est très belle encore. Après un début de 25 km sur la route un peu passante, nous bifurquons à gauche pour rester au plus près de l’océan. Nous surplombons des plages magnifiques ourlées d'écume, faisons une heureuse escale pique-nique face aux vagues d'où émergent des surfeurs attendant le bon moment à Imsouane, et terminons à Tafedna par une
dizaine de km de piste roulante. Aziz nous ouvre la maison de son frère pour une somme modique, où nous disposons du rez-de-chaussée entier…
Dès les premiers hectomètres le lendemain, nous sommes au village de pêcheurs. Belle plage sauvage, pas de surfeur ici, la baie est calme. Quelques grosses barques et une rangée de maisons bleues et blanches, la bourgade est minuscule. Quelques photos, macadam retrouvé, nous pouvons entamer une longue montée qui nous mène sur un plateau vallonné agréable, parsemé d’arbres et de petits villages. Après avoir rattrapé la route principale où nous nous méfions un peu plus des bolides, nous atteignons rapidement Smimou, bourgade très vivante, où des montagnes de fruits et légumes bordent la route. La distance est ensuite vite faite jusqu’à Essaouira où nous arrivons vers 14 h. D’hôtels en auberges de jeunesse trop chers à l’intérieur de la médina, il nous faudra une petite heure pour trouver une chambre confortable à prix
acceptable à l'extérieur mais proche des fortifications portugaises. Très bien, draps, serviettes, nos montures dans la chambre, salle de bain privative, embourgeoisement donc… Pas vraiment vu le prix ! Petite douche en vitesse et nous profitons du soleil pour entamer la visite, qui durera 2,5 jours. Plage, port de pêche important et très vivant, étalages de poisson frais, ou non, médina, concentration impressionnante de goélands dont les déjections nous atteignent parfois, remparts garnis de canons tous différents, tours et bastions, venelles, ruelles, parties commerçantes ou au contraire réservées à l'habitation de la médina, galeries d’artistes, placettes, souk. Nous prenons vite nos repères dans cette ville à taille humaine, qui est blindée de touristes parce qu’elle vaut définitivement le détour. Les vagues s’écrasent et font de belles gerbes sur les rochers au pied des remparts, la température est agréable. De la pluie dans la seconde soirée et nuit, visiblement bienvenue, rafraîchit l’atmosphère momentanément, mais dès le lendemain nous retrouvons le soleil. C’est d’ailleurs la météo annoncée sur toute la côte atlantique jusqu’au 12
novembre… Logeant dans un quartier populaire, nous avons tout à portée de main (épicerie, fruits, petits restos), à des tarifs parfois trois fois moins élevés que dans la partie touristique, à 1 km.
Nous reprenons la route dans le calme d’un matin frais, dans l’air chargé d’humidité. La première petite bosse de rien du tout anéantit nos efforts pour rester au sec et ne pas transformer t-shirts et chemise en serpillières blanches de sel. Un premier détour pour aller à Moulay Bouzertkoum, où la mosquée blanche se détache sur le bleu de l’océan. Le village est vide. Passé Sidi Ishaq, nous décidons de pousser jusqu’à Souira Kedima. Dans ce village de résidences secondaires ou de vacances, sans hôtel ni auberge, nous trouvons à nous loger en louant un appartement pour une nuit. Le prix est modique ( moins de 10 euros par tête) et nous disposons d’une cuisine. Des dizaines de grosses barques de pêche colorées, à l'eau ou sur le sable, rendent agréable la visite du port très odorant, et centre névralgique de la bourgade.
Il ne nous reste que 33 km pour rejoindre Safi le jour suivant. Cette ville industrielle où notre entrée est peu glorieuse, main sur la bouche et à moitié en apnée pour lutter comme on peut contre les fumées de l’immense usine de phosphore, est toute en longueur le long de l'océan. D’ailleurs, ça a commencé par la centrale thermique, terminus de la ligne ferroviaire, puis les travaux du nouveau futur port industriel de Safi, puis cette usine de phosphore. Bref, si tu ne veux pas choper un cancer, il est plus prudent de vivre ailleurs. Nous nous installons à l'hôtel de Paris, très propre, vaste chambre à 2 lits doubles, dont la fenêtre donne sur du calme, toit terrasse avec fils pour faire sécher la lessive et la vue sur les toits… le tout pour 5,8 euros chacun la nuit, assurément le meilleur rapport qualité/prix de ce voyage. Safi n’attire pas les touristes, et pourtant, y faisant halte une journée et demie, nous avons trouvé beaucoup de charme à la vieille médina, entourée de remparts, où seule la partie basse est commerçante. Le reste est un quartier populaire, avec des gosses qui jouent dehors, des gens qui circulent à pied, vaquant à leurs occupations. Plutôt “délabrées”, les
venelles en pente et tortueuses nous ont offert des arches, portes, passages couverts, couleurs et détails photogéniques à profusion. Sous la corniche, les vagues là aussi s’écrasent en grosses gerbes d'écume blanche, et il faut se méfier des bombardiers goélands. Après le port de pêche dont l'accès nous a été refusé par la police (sous prétexte de dimanche) se trouve le port industriel, zone frontière, avec ses silos de phosphates. Les trains de marchandises chimiques passent très lentement dans un potin d’enfer. Safi est également réputée pour sa poterie. À l'entrée, nous nous sommes arrêtés au village des potiers où chacun à sa spécialité. Certains tournent, puis vendent à ceux qui peignent, qui vendent à ceux qui ont le four… Rares sont les artisans qui font tout de A à Z. Nous visitons également la colline des potiers, petits ateliers, les fours traditionnels où les pneus, vêtements foutus, plastiques étaient cramés autant que le bois sont maintenant remplacés par des fours à gaz, moins
polluants. C’est qu’à Safi, la pollution se voit et se sent. La dernière demie journée est consacrée au repos, avant de reprendre la route demain, direction El Jadida par Oualidia… nord-est, face au vent !
Comme d'habitude, plein de nouvelles photos dans la rubrique "photos"...